Golden League - Paris-Saint-Denis : Roblès seul au monde

Jeremy, LaShawn et les autres. C’est ainsi que les tours de piste s’égrènent cette saison et celui couru au Stade de France n’a pas dérogé à la règle. Les deux Américains ont chacun animé une moitié du 400 mètres, mais c’est Jeremy Wariner qui a conclu victorieusement, s’emparant au passage de la meilleure performance mondiale de l’année (43’’86). Celui qui lui contestera le titre olympique dans quelques semaines à Pékin s’est, lui, incliné sur un temps de 44’’35. Merritt avait pourtant pris le meilleur départ, avalant le Bahaméen Chris Brown et pénétrant largement en tête dans le virage. C’était sans compter sur l’assurance de Wariner. Le Texan a tranquillement augmenté son rythme pour aborder les cents derniers mètres en tête.

La silhouette décontractée du champion olympique n’a ensuite pas eu à craindre le retour de son plus sérieux rival. « C’est fabuleux, a commenté Wariner. J’ai effectué ma course exactement comme je le désirais. Mon finish est excellent et le temps est très bon ». LaShawn Merritt n’a cependant pas été abattu par ce deuxième revers consécutif face à Wariner. « Mon temps est bon, a dit celui qui avait battu le champion olympique à Berlin puis aux sélections US. Je me sens bien, il n’y a rien qui va de travers ». Derrière les deux Américains, il y avait un gouffre, ce soir à Saint-Denis. Leslie Djhone, le recordman de France, a, lui, pris la sixième place, crédité d’un temps de 45’’43, son deuxième chrono de la saison, loin toutefois de ses 44’’46 réalisés l’été dernier à Osaka.

Robles, la grande menace

Ladji Doucouré commence à retrouver le sourire. Après un début de saison moyen, le hurdler français est enfin passé sous les minima, lui qui fait déjà partie d’une liste de vingt athlètes pré-sélectionnés pour les Jeux Olympiques. Il a terminé quatrième du 110 mètres haies en 13’’37, mais n’a pas été en mesure de jouer un rôle décisif dans la course francilienne. « Je ne dirai pas que je suis satisfait mais il y a de l’amélioration par rapport aux dernières courses, a d’ailleurs affirmé le champion du monde 2005. Je suis bien parti mais courir derrière Robles lance sur un faux rythme et fausse les repères. Je vais travailler sur plus de cinq haies maintenant. Ce que je n’ai pas encore fait jusqu’ici ». Devant, Dayron Robles est parti, très vite, creusant l’écart à partir de la troisième haie.

Surtout, le Cubain a terminé avec un temps astronomique de 12’’88, à seulement un centième de son propre record du monde établi à Ostrava le 12 juin dernier. « Le temps est incroyable, a déclaré Robles. Je ne sais pas d’où me vient cette force, cette tranquillité. Tout a été parfait. J’étais ici pour faire moins de 12’’9 ». Les Américains Terrence Trammell (13’’19) et Antwon Hicks (13’’27) se sont intercalés entre les deux hommes. Absent remarqué de ce 110 mètres haies, le Chinois Liu Xiang peut désormais mesurer pleinement la menace Robles, alors qu’il s’apprête à défendre son titre olympique. Le Cubain a tout simplement réussi quatre des cinq meilleurs temps de l’année 2008, alors que Liu Xiang n’a couru qu’en 13’’18 jusqu’à présent. Et cela remonte au 24 mai dernier.

Sur 400 mètres haies, un duel américain, comme sur le tour de piste, a vu Kerron Clement, champion du monde en titre, prendre le meilleur sur Bershawn Jackson, lauréat en 2005. Hormis le chrono, la configuration de course a été identique au succès de Wariner. Après avoir laissé son compatriote prendre le meilleur départ, Clement a refait son retard à l’entrée du dernier virage puis a placé une ultime accélération dans la ligne droite. L’étudiant de l’université de Florida s’est imposé avec un modeste chrono de 48’’33. « Mais je ne suis pas déçu par le temps, a-t-il affirmé. C’était une très bonne course, il était important de finir premier ». Jackson, de son côté, a levé le pied pour finalement laisser Danny McFarlane et Angelo Taylor le devancer. C’est la deuxième fois d’affilée que Kerron Clement domine Jackson, après son succès à Rome. Il a ainsi repris l’ascendant sur celui qui l’avait battu aux sélections américaines.

Vlasic et Jelimo toujours en course pour le pactole

Dans la course au jackpot de la Golden League, Blanka Vlasic a signé un nouveau succès au saut en hauteur sans toutefois approcher le record du monde de Stefka Kostadinova (2,09 m). La Croate s’est contentée de passer 2,01 mètres. La jeune Kenyane Pamela Jelimo, dix-huit ans, a également préservé son invincibilité sur 800 mètres, signant au passage la deuxième meilleure performance mondiale de l’année en 1’54’’97 et le meilleur chrono de sa carrière. En tête dès le début de la course, Jelimo s’est échappée à deux cents mètres de l’arrivée, reléguant la Slovaque Lucia Klocova à près de trois secondes et demie. Côté français, la bonne nouvelle du double tour de piste féminin est venue d’Elodie Guegan. Avec un temps de 1’58’’93, soit quarante-sept centièmes de mieux que ce qui était demandé, la Tricolore sera du voyage à Pékin.

Sur un 100 mètres privé de ses stars Usain Bolt, Tyson Gay et Asafa Powell, le Français Martial Mbandjock a, lui aussi, agréablement surpris en prenant la deuxième place en 10’’17 à quatre centièmes seulement de la qualification pour les Jeux. La victoire est revenue au représentant de Trinidad-et-Tobago, Marc Burns en 10’’14. En revanche, Romain Mesnil a terriblement déçu au saut à la perche. Déjà pré-sélectionné pour les Jeux et donc à l’abri d’une absence de minima, le vice-champion du monde a échoué à ses trois essais sur 5,40 mètres. Muriel Hurtis a été discrète sur 200 mètres, finissant cinquième en 22’’76 derrière quatre Américaines. Salim Sdiri, après de longues semaines sans pouvoir sauter à cause d’une douleur à un genou, s’est contenté de 7,90 mètres. Enfin Bouabdellah Tahri a terminé quatrième de son premier 3000 mètres steeple de l’année en 8’12’’72.

Comme c’est le cas depuis la création du meeting, aucun record du monde n’a été établi. Les athlètes avaient les yeux rivés sur Pékin. Autre déception, l’enceinte francilienne n’a pas non plus été très vivante. On a davantage entendu la musique et les animateurs que les spectateurs qui avaient pris place dans des gradins clairsemés. Michael Johnson, Bob Beamon (invité pour le quarantième anniversaire de son saut prodigieux (8,90 m) à Mexico) et Donovan Bailey sont ainsi quasiment passés inaperçus dans le stade. Dans quelques jours, de l’autre côté de la planète, tant au niveau des performances que de l’ambiance, ça sera beaucoup mieux.