Leslie Djhone : « Je ne pouvais pas tout plaquer »
Publié le mardi 18 octobre 2005 à 13h53min
Leslie Djhone s’est finalement décidé à poursuivre l’aventure avec son entraîneur, François Pépin. Après une saison 2005 ponctuée par les blessures et la brouille avec son partenaire d’entraînement, Marc Raquil, après avoir envisagé d’émigrer outre-Atlantique, il a présenté aux côtés de son entraîneur, au cours d’une conférence de presse dans les locaux de la FFA, sa nouvelle structure d’entraînement pour la saison qui s’ouvre.
Au sein d’un groupe où le rejoindra à la fin du mois Marc Raquil, qui continue lui aussi, en fin de compte, le chemin avec Pépin. « On a décidé, avec Marc et Leslie, de tirer le rideau sur ce qui s’est passé. De ne pas oublier, de ne pas chercher à résoudre un différent où chacun resterait sur ses positions, mais de repartir de manière différente sans ressasser tout cela. Si une nouvelle amitié renaît, tant mieux, mais ce n’est pas le cas pour l’instant », a prévenu François Pépin. Leslie Djhone, lui, a expliqué point par point ses réflexions récentes, tout en se projetant vers l’avenir.
Leslie, après de longues semaines de réflexion, vous avez décidé de repartir, cette année, avec François Pépin, qui est votre entraîneur depuis huit ans. Quand avez-vous pris cette décision ?
C’est tout récent, cela date de la fin de la semaine dernière. J’ai longtemps réfléchi, j’ai eu beaucoup de contacts, ce fut une décision lourde à prendre. En huit ans avec François, je n’ai connu qu’une mauvaise année. Est-ce que je devais le quitter avec le doute de savoir si je n’aurais pas dû rester avec lui ? Je ne crois pas. Cette année, je vais voir ce qu’il en est. Et si je décide de partir, plus tard, j’aurai au moins essayé. Je ne pouvais pas me permettre de dire que son entraînement était nul alors que cela s’était bien passé pendant sept ans. Partir aux Etats-Unis, j’en ai parlé avec les anciens, avec Marie-José Pérec, avec Christine (Arron)...
Disons que les avis divergeaient. Mais mes proches m’ont dit qu’ils ne m’imaginaient pas trop là-bas. Je ne voulais pas me demander ce que je faisais là au bout de deux mois. Je ne voulais pas tout plaquer sur un coup de tête. Des stages là-bas pourraient donc être une première approche. Je voulais aussi partir ailleurs pour ne plus avoir à faire avec les problèmes qui se sont passés dans le groupe cette année. Mais bon, je suis un grand garçon. Je vais faire de l’athlétisme en professionnel : je viendrai au stade pour m’entraîner, puis je rentrerai chez moi. En football, c’est pareil : tout le monde ne s’entend pas forcément dans la même équipe.
Vous évoquiez les contacts que vous avez eus. On a en effet un temps pensé que vous pourriez partir vous entraîner aux Etats-Unis...
Oui, c’est vrai que j’ai eu des contacts, et que j’en ai discuté. Les américains ont prouvé qu’ils étaient les maîtres du monde sur 400 m. On dira « ils se dopent », mais il ne peut pas y avoir que ça. Même les athlètes qui ont réalisé de grosses performances cette saison et qui ne sont pas américains s’entraînent quasiment tous là-bas. Ça peut valoir le coup d’aller voir ce qui s’y passe. J’en ai envie, en tout cas. On en discute avec François, il est ouvert pour en parler, c’est donc une possibilité. On pourrait imaginer un stage en avril, se rendre aux Penn Relays... On en parle, on va avancer sur le sujet. Mais si ça se trouve, ils vont nous dire « On ne veut pas vous voir chez nous » !
Vous le disiez, on évoque souvent le dopage quand on parle du 400 m aux Etats-Unis...
Je ne peux pas me mettre dans les starting-blocks en me disant que mes adversaires ne sont pas battables. Si je me dis qu’ils sont dopés, autant arrêter l’athlé tout de suite. A part Wariner, tous les meilleurs actuels faisaient déjà de très belles perfs en juniors. A moi de me bouger les fesses, à moi de ne pas me dire qu’ils sont inaccessibles.
Vous avez aussi envisagé d’effectuer quelques séances de vitesse avec votre ami Ladji Doucouré et son entraîneur, Renaud Longuèvre...
Le fait que je sois sprinteur me donne envie de courir et de m’entraîner avec des personnes qui courent vite. Mais ces séances communes sont très difficilement réalisables, tout simplement parce que nos programmes ne sont pas les mêmes. Je ne peux pas faire une séance de vitesse avec Renaud et Ladji si j’ai eu droit, le veille, à une grosse séance avec François. C’était une idée, on en a discuté, mais ce n’était pas faisable.
François Pépin intervient :
« Ce qui ne veut pas dire que le projet est tombé aux oubliettes. On pourra envisager des séances communes, car je m’entends très bien avec Renaud. En sachant qu’on ne court pas de la même façon un 60 m quand on est coureur de 110 m haies ou de 400 m ».
Parmi les nouveautés dans votre structure d’entraînement cette saison, François Pépin parle d’un travail avec des effectifs plus réduits, des « micro-groupes » de deux ou trois athlètes, et d’un recours plus fréquents aux soins et au repos au sein du CERS (Centre Européen de Rééducation du Sportif) à Saint-Raphaël...
C’est un suivi médical un peu plus spécifique. Je n’ai plus 17 ans, et je commence à connaître mon corps. Et je sais qu’il vaut mieux faire de la prévention que des soins. L’idée, c’est de pouvoir récupérer régulièrement, de mettre le corps au repos, de nettoyer l’organisme au CERS de Saint-Raphaël quelques jours toutes les cinq à six semaines, en fonction de ce qu’on aura fait à l’entraînement et de notre programme.
Quels sont les autres changements ?
J’ai changé de club, puisque je quitte Neuilly-Plaisance pour rejoindre l’ES Montgeron (NDLR : qui est déjà le club de Ronald Pognon). Je voulais repartir vers un club plus petit, plus familial, où je pourrais par exemple joindre le président quand je le veux.
Que vous inspire cette période de doute et de réflexion que vous venez de traverser ?
Je me suis remis en cause sur pas mal de points. Peut-être ai-je été un peu léger dans ma vie d’athlète. Peut-être que je ne donnais pas suffisamment mon avis à François sur ce qu’on faisait à l’entraînement.
Qu’est-ce qui a changé pour vous depuis 2003 et 2004 ?
Je ne suis plus le même, car il y a l’attente du public. J’ai beaucoup plus de pression qu’auparavant, je ne peux plus arriver tranquillement sur une compétition. Je dois être beaucoup plus pro pour réaliser ce que je veux. On m’en demande beaucoup plus, que ce soit les sponsors, qui investissent sur vous et veulent vous voir perfer, ou le public, qui veut soit vous voir sur un podium, soit réaliser un chrono.
Quels seront vos objectifs, pour cette saison ?
Une de mes priorités sera de revenir à la vitesse, retrouver ces qualités. A la base, je viens du sprint et du saut en longueur, je veux retrouver mes qualités de pied, de rapidité, grâce sans doute à davantage de musculation naturelle, tout en gardant une séance de musculation en salle par semaine, mais en faisant très attention. Ce sont peut-être de mauvais gestes en musculation qui ont provoqué des tensions dans mon corps la saison passée.
Vous allez courir davantage de 200 m qu’auparavant ?
L’objectif est de courir des 200 m beaucoup plus tôt dans la saison, dès avril, pourquoi pas aux Penn Relays, aux Etats-Unis, avant de revenir en France pour courir sur 400 m. Mais c’est François qui verra tout ça, c’est lui qui sait, c’est lui l’entraîneur. Je lui fais confiance. Avec lui, en fin de saison, après tout ce qui m’était arrivé, j’ai gagné le DécaNation. Je ne veux pas non plus tout bouleverser, saboter ma saison en prenant des risques pour les championnats d’Europe parce que je fais des tests. Je sais que cette compétition sera rude, avec les anglais qui reviennent en force, ou Marc (Raquil) qui aura envie lui aussi. Je devrai être à 100 %. Et avec François, je sais que j’ai toujours été prêt le jour J.
Les championnats d’Europe sont la compétition idéale pour vous relancer ?
Il y a deux côtés : c’est l’idéal pour se relancer, mais si on se casse la g..., cela fait plus mal encore... Je vais essayer d’être plus carré dans l’entraînement, de travailler mes lacunes. Techniquement, je suis « à la rue ». Il faut que je sois plus fluide. En finale des championnats du monde, tous les athlètes l’étaient...
Vous envisagez de courir une saison en salle ?
Non. Je courrai un ou deux 60 m, pour rigoler. Peut-être que j’ai perdu cela, aussi : le plaisir de courir comme un cadet. Lorsqu’on s’entraîne tout l’hiver, on a envie de compétitions pour s’amuser. Mais je ne courrai pas aux championnats de France, ni aux championnats du monde. Et puis, je ferai aussi quelques rassemblements avec le relais 4x100 m. J’ai rencontré Laurence Bily à Saint-Raphaël, qui m’en a parlé. Mais je ne postule absolument pas à une place dans le relais. Mais s’il y a un pépin, sur certains déplacement ou certaines compétitions, je peux être là pour dépanner.
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