Chpts d’Europe - Triple saut : Une claque pour Tamgho

Une médaille amère

Il avait tellement clamé qu’il ne visait qu’un métal, l’or, que la médaille de bronze décrochée jeudi soir par Teddy Tamgho avait un goût amer. Avec un meilleur saut à 17,45 m, le jeune Français a dû se contenter de la troisième place, loin derrière Phillips Idowu (17,81 m) et Marian Oprea (17,51 m). En zone mixte, à l’heure de mettre des mots sur ses sentiments, Tamgho ne « se mentait pas », comme il aime à le répéter. « Pour moi, c’était la gagne ou rien du tout aujourd’hui. Cette médaille ne me fait pas plaisir mais je suis content de la ramener à la France. Mais personnellement, j’aurai préféré sortir du podium que de finir troisième », déclarait-il, tout à sa déception. Le discours tranche avec ce que l’on a habitude d’entendre alors on le fait répéter, pour être sûr d’avoir bien compris. « C’est une claque ! Je voulais gagner, je me prépare pour cela, pas pour autre chose », confirme-t-il.

Meilleur performer mondial de la saison (17,98 m), recordman du monde en salle (17,90 m) et premier des qualifications il y a deux jours, Teddy Tamgho ne se voyait pas ailleurs que sur la plus haute marche. A-t-il alors fait preuve d’excès de confiance ? Il s’en défend. « Je suis toujours resté lucide. Il n’y a pas de patron au triple saut. C’est difficile à chaque fois. J’ai toujours dit qu’Idowu était très fort, que c’était un homme de championnat. Je savais qu’il allait sortir quelque chose. Il est capable de faire 18 mètres ». La déception du compagnon de chambre de Benjamin Compaoré n’est donc pas liée à un sentiment de toute puissance qui l’aurait aveuglé. Non, c’est plutôt le signe d’une ambition débordante. Celle qui lui avait permis d’aller voir Jonathan Edwards pour lui annoncer tout de go qu’un jour il battrait son record du monde (18,29 m). Une ambition forcément contrariée ce jeudi soir sur le sautoir du Stade Olympique de Monjuïc.

Tomber pour mieux se relever ?

« Je ne vais pas me mentir, c’est une claque. 17,45 m quand on sait que toute la saison, hormis une fois, j’ai sauté au-delà de 17,50 m… » La phrase n’ira pas plus loin mais elle dit bien toute la frustration, toute la rage contenues en lui, tous les reproches qu’il doit se faire dans sa tête. On lui demande alors s’il n’est pas trop dur avec lui-même. Après tout, il n’a que 21 ans et l’avenir devant lui. La réponse, là encore, se fait cinglante. « Je suis dur avec moi-même car quand on recherche la perfection, il faut se faire des reproches. Si à chaque fois, on se dit c’est bien, jamais on n’arrive à franchir le pas. Je préfère bien m’écraser aujourd’hui pour avoir encore plus de hargne quand je reprendrai l’entraînement l’année prochaine ». Car déjà, Teddy Tamgho, toujours sûr de lui et de ses capacités, se tourne vers l’avenir. « Après une claque, je suis toujours revenu plus fort et ça ne changera pas. J’ai pris des claques à Berlin (Ndlr : 11 ème lors des championnats du monde 2009) et à Turin (Ndlr : éliminé en qualifications aux championnats d’Europe en salle en 2009) et je suis revenu « en force » à Doha. Aujourd’hui, je prends une claque. Mais c’est pour 2012. Le grand objectif reste les JO de 2012 », clame-t-il avant de tourner les talons et de quitter le stade de Montjuïc.

* Article publié par Emmanuel Quintin