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Saïd Aouita : « Marre de voir courir des robots ! »

Publié le lundi 15 août 2005 à 16h51min

Au Maroc, cet homme est un mythe, encore plus adulé que son compatriote Hicham El Guerrouj, double champion olympique à Athènes en 2004 sur 5000 et 10000 mètres. Entre Casablanca et Rabat, un train rapide porte même son nom : l’Aouita.

Il y a vingt ans, Saïd Aouita battait en l’espace de deux semaines les records du monde du 1500 mètres et du 5000 mètres. Deux ans plus tard, à Rome, le marocain pulvérise encore son propre record du 5000 mètres. En 12’58"39, il est le premier homme à descendre sous la barre des treize minutes. Exilé en partie aux États-Unis et désormais citoyen américain, le champion olympique du 5000 mètres (1984, Los Angeles) est aujourd’hui consultant télé.

Que devenez-vous Saïd Aouita ?

Après m’être occupé de l’athlétisme australien, je m’investis aujourd’hui dans la promotion de l’athlé avec la chaîne Al Djazira Sport au Qatar. Nous avons racheté tous les droits possibles de retransmission de ce sport. Pour moi, mon avenir se situe sur cette chaîne. Aujourd’hui, la télévision est le meilleur support pour faire passer le message de l’athlétisme, pour promouvoir encore mieux ce sport.

Vous qui avez la nationalité américaine, comment avez-vous vécu le trafic de produits dopants révélé en 2003 par l’affaire Balco ?

D’abord, le dopage n’existe pas seulement dans l’athlétisme, on le retrouve dans le football, dans le tennis, dans tous les sports. Cela dit, je crois que la fédération internationale (IAAF) fait un énorme effort pour nettoyer notre sport, éliminer les tricheurs.

Quelle est la part des tricheurs aujourd’hui dans l’athlétisme international ?

Tout ce que je peux affirmer, c’est que beaucoup d’athlètes se dopent encore aujourd’hui... On voit beaucoup de performances inimaginables, ce sont souvent des robots qui courent.

Selon vous, il faut nettoyer ce sport de « fond en comble » ?

Évidemment. Pourquoi les stades sont de plus en plus vides lors des grands événements ? C’est peut-être parce que les gens en ont marre d’aller voir des compétitions faussées par le dopage. Et c’est peut-être pour cela que, moi, personnellement, je n’enverrai pas mes enfants faire de l’athlétisme...

Vous semblez dégoûté ?

Moi, j’aime l’athlétisme. Mais, sincèrement, si vous me demandez si j’aime le demi-fond, je dis non. Je sais qu’il y a encore beaucoup de choses qui se passent aujourd’hui en matière de dopage avec l’EPO ou les hormones de croissance.

Le dopage circule toujours dans le demi-fond actuellement ?

Oui, je crois.

Des performances récentes vous ont-elles vraiment étonné ?

Bien sûr, beaucoup de performances. Mais pas mal de monde ferme les yeux. Je le répète, j’espère simplement que la fédération internationale sera suffisamment forte pour nettoyer ce sport.

Des victoires vous ont-elles surpris lors des derniers jeux olympiques d’Athènes ?

Il n’y a pas que les jeux olympiques d’Athènes. Dans le demi-fond, tout a commencé depuis 1994-1995, avec l’usage de l’EPO.

À vous suivre, dans l’athlétisme moderne, un compétiteur avec du talent est donc condamné à se faire toujours battre par les tricheurs ?

Je crois, oui. Tous les meilleurs, ceux qui ont fait la légende de l’athlétisme, Sebastian Coe, Alberto Juantorena, Mirius Yfter, s’ils couraient à l’époque actuelle, ils seraient largués, ils ne seraient rien.

Peut-être aussi parce que l’époque a changé, les athlètes d’aujourd’hui sont beaucoup plus professionnels ?

Non, je ne crois pas à ce genre d’argument. J’ai été six fois recordman du monde, je sais ce qu’il faut faire pour battre un record. Moi, je sais ce qu’est une performance du 800 mètres au 10000 mètres. Je sais les efforts que demandent certains chronos. Et, il faut vraiment des efforts mortels pour produire certains chronos réalisés au cours de ces dix dernières années. Autant dire qu’il y a donc pas mal de choses qui m’ont dégoûté dans un passé récent.

À vous écouter, tout est perdu ?

Non, il faut continuer la lutte antidopage, coordonner les efforts des agences nationales antidopage et ceux de l’agence mondiale antidopage. Il faut nettoyer encore et encore.

Quel bilan faites-vous de ce mondial d’Helsinki ? Certains se plaignent que l’athlétisme manque de grandes stars...

Moi, je crois au contraire qu’il y a beaucoup de changement, on voit énormément de nouveaux visages. Une nouvelle génération est en train d’émerger dans l’athlétisme. C’est un bon championnat du monde, parce qu’on voit de la nouveauté, notre sport se nourrit et se construit grâce à cela.

Alors, qui sont les vedettes de l’athlétisme de demain ?

Sur 1500 mètres, il y a le bahreïnien Rachid Ramzi, l’éthiopien Kenenisa Bekele sur 10000 mètres, la cubaine Zulia Catalayud, championne du monde du 800 mètres, l’américaine Lauryn Williams, vainqueur du 100 mètres ici... Tous ceux-là, plus quelques autres, sont les athlètes de la nouvelle génération et elle va rester en place pour un bon moment.

Face à la domination des africains, les européens peuvent-ils encore espérer l’emporter sur les longues distances et le demi-fond ?

Pourquoi pas ? En athlétisme, la division du monde est question de moyens. Nous, les africains, nous nous concentrons sur la course de fond parce qu’elle demande beaucoup moins de moyens. Les européens et les américains se spécialisent dans les épreuves techniques parce qu’ils sont plus à même d’investir dans ces disciplines qui demandent un peu plus d’équipements. Mais la tendance finira un jour ou l’autre par s’inverser.

Donc, il vaut mieux être « pauvre » pour réussir en athlétisme ?

Avoir faim vous donne toujours envie d’aller plus loin. Je crois aussi qu’il y a une timidité, une sorte de complexe des athlètes européens vis-à-vis des africains. Et puis il y a aussi un gros problème de prospection en Europe. Recruter un maximum d’athlètes est assez facile sur le continent africain. En Afrique, les jeunes peuvent facilement délaisser l’école pour ne faire que du sport. En Europe, c’est beaucoup moins évident.

Comment expliquez-vous le renouvellement permanent de l’athlétisme aux États-Unis ?

Les américains bénéficient de la richesse de leur système universitaire, du moins en ce qui concerne le sport. Et s’ils privilégient toujours le sprint et les disciplines de saut ou de lancer, ils commencent maintenant à créer des écoles de fond et de demi-fond. De plus en plus, aux États-Unis, des sponsors soutiennent les athlètes américains du fond et du demi-fond pour qu’ils fassent leurs armes dans les grands meetings.

Qu’est-ce qui fait qu’un pays se dote d’un bon système athlétique qui lui permettra de réussir dans les grands événements internationaux ?

Il faut d’abord une bonne gestion sportive soutenue par un pouvoir politique qui se donne des objectifs pour le sport national. Mais il ne faut pas que la politique s’immisce de trop près dans la gestion sportive, la piste appartient aux techniciens et aux athlètes.

Avez-vous l’intention de revenir entraîner au Maroc ?

Oui, j’espère que, pour les jeux olympiques de 2012, je serai repris par les responsables marocains pour reprendre en main l’athlétisme. Mais, j’en parlerai en temps voulu...

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