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Fabrice Calligny : « Je dois redorer mon blason »


Publié le vendredi 11 novembre 2005 à 14h48min

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Il fut le sprinter le plus doué d’une génération dorée, celle de Santiago du Chili. Et le meilleur junior du Vieux Continent sur 100 m. Champion d’Europe juniors en 1999, 2 ème du 4x100 m des mondiaux de Santiago en 2000, Fabrice Calligny est aussi un miraculé de l’athlétisme.




Malgré ses 10"22 en 2003, malgré son jeune âge (il vient de fêter ses 24 ans), il avait tout bonnement décidé d’arrêter l’athlétisme. Helsinki l’a sauvé, puisque la victoire mondiale de ses anciens coéquipiers du 4x100 m, vécue devant son poste de télévision, lui a donné le coup de fouet nécessaire. Le martiniquais a débarqué en métropole, où il s’entraînera désormais avec Guy Ontanon, aux cotés de Ronald Pognon. Pourhttps://www.athle.fr/ il s’explique.

Fabrice, votre arrivée en métropole a constitué une vraie surprise. D’une part parce que vous aviez toujours répété que vous vouliez rester en Martinique, d’autre part parce que vous aviez un peu disparu du circuit... Quand avez-vous pris la décision de franchir le pas ?

J’ai pris cette décision après Helsinki. Quand j’ai vu que les gars devenaient champions du monde du 4x100 m, et que pas mal d’athlètes du Chili* avaient brillé en Finlande. Cela m’a poussé, cela m’a motivé. Quand le relais français l’a emporté, je me suis dit que j’aurais eu ma place dans cette équipe si je n’avais pas déconné. J’aurais pu être là, avec eux... Cela m’a donné la rage. Trop, c’était trop.

Depuis quelques temps, on entendait dire que vous étiez finalement le seul du relais de Santiago à s’être perdu en chemin...

Cet été, j’ai lu dans la presse un article avec une photo du 4x100 m de Santiago. On évoquait la progression de Ladji, de Ronald, de Leslie. Mais arrivé à moi, on disait que j’étais le seul du groupe à ne pas avoir confirmé. Ça m’a fait mal. Les gars avaient réussi. Je devais redorer mon blason. Voyez ce que fait Ronald (Pognon)... Je n’ai pas la prétention de dire que je vais faire aussi bien que lui, mais je devais essayer de revenir au moins à mon niveau.

Dans quel état d’esprit étiez-vous cet été ?

En fait, en Martinique, je vivais une sorte de saturation par rapport à l’entraînement. Au printemps, j’ai eu une nouvelle blessure qui m’a privé des championnats de France. J’ai alors envoyé un SMS à mon entraîneur pour lui dire que j’arrêtais totalement l’athlétisme. Que j’arrêtais tout.

Sur un coup de tête ?

Non, c’était mûrement réfléchi. Depuis le mois d’avril, j’en avais marre, je n’avais plus l’impression d’avancer, j’avais pris du poids, je n’avais plus aucune motivation. Je m’entraînais juste pour la forme. Mais les championnats du monde ont tout changé. Je me suis dit que je ne pouvais pas m’arrêter comme ça. Que je n’avais finalement jamais exploité mon potentiel. Je voulais au moins avoir tout donné une fois, avoir tenté ma chance. Ne pas arriver à trente ans en regrettant de ne pas être venu m’entraîner en métropole, que cela marche ou pas.

Qu’est-ce qui vous a fait penser que vous deviez venir en métropole, justement ?

C’est toute cette génération de sprinters qui étaient là, dans ces années où j’ai brillé, et qui n’avaient pas réalisé les temps que j’ai réalisés en junior, à part Eddy De Lepine. Je connais bien Ronald Pognon, David Alerte, qui sont tous deux martiniquais. Je me suis dit que s’ils en étaient arrivés là, il n’y avait pas de raison que je n’y arrive pas. Il fallait que je m’en donne les moyens, que je sois sérieux. Mon plus gros sacrifice, je le faisais en venant ici, en métropole. Maintenant, il me reste à travailler.

Comment s’est déroulée votre rencontre avec Guy Ontanon ?

Je connais bien Dimitri Demonière, qui s’entraîne avec lui. Je lui avais dit que j’aimerais m’entraîner avec ce groupe, et Dimitri m’a conseillé d’en parler au coach. Je suis arrivé en France le 14 octobre. Le mardi suivant, à l’Insep, je rencontre Guy Ontanon pour lui dire que j’aimerais qu’il m’entraîne. Il me dit qu’il a besoin de quelques jours de réflexion, et qu’il me donnerait sa réponse dans la semaine. Le midi même, alors que je suis en train de manger dans le réfectoire, Guy s’arrête près de moi. « C’est OK, et tu commences demain », me dit-il ! Carrément, le jour même ! Moi, je n’avais rien fait, je n’avais pas un footing dans les jambes ! Et je peux vous dire qu’il n’avait pas aménagé la séance pour moi ! Je n’avais aucune condition physique... Cette séance, je crois que je m’en souviendrai toute ma vie. J’ai eu mal partout pendant une semaine, je n’arrivais plus à marcher. Mais avec la superbe ambiance qu’il y a dans ce groupe, j’ai pu tenir le coup. Du coup, je sais que je tiendrai toute la saison. Les premières séances sont souvent déterminantes.

Si on comprend bien, vous êtes venu en métropole sans savoir si Guy Ontanon allait accepter de vous entraîner ?

Exactement. Je suis parti comme ça, sur un coup de poker. J’ai logé pendant deux semaines chez Dimitri Demonière et je vis actuellement chez ma famille. J’avais eu un petit différent avec Guy à Munich en 2002 (pour les championnats d’Europe, ndlr), quand il ne m’avait pas pris dans le relais, même si je sais que c’était la DTN en général qui décidait. Je lui en avais voulu. Mais on a discuté, et tout s’est bien passé.

Comment les gens ont-ils pris votre départ, en Martinique ?

En fait, je n’en ai parlé à personne. J’ai dit à mon entraîneur que je partais pour les études, puisque je voulais passer une licence en management. Je n’ai pas tenu à ébruiter mon départ. Là-bas, tout le monde pense tellement de choses à mon propos... Je voulais faire un come-back discret. C’est raté, car j’ai déjà droit à des articles. Mais on m’a dit que mon entraîneur, en Martinique, pense que c’est une très bonne chose pour moi, qu’il voit tout cela d’un bon œil.

Fabrice Calligny qui cherche la discrétion, c’est une nouveauté... Par le passé, vous avez toujours voulu être le meilleur, et le faire savoir, non ?

Je ne voulais pas que tout cela se sache, même si en sprint, c’est difficile de rester discret. Mais si j’avais voulu me faire connaître, j’aurais fait une conférence de presse en Martinique ! Dans l’entraînement, je veux rester discret. Après, c’est vrai que c’est totalement différent sur la piste, en compétition. Là, j’aurai toujours un mental de gagnant.

La cohabitation de deux athlètes qui aspirent au très haut niveau dans une même discipline et dans un même groupe n’est pas chose aisée. On en a eu des illustrations ces dernières saisons. Vous ne craignez pas la cohabitation avec Ronald Pognon ?

Quand deux athlètes de haut niveau s’entraînent ensemble, chacun doit en tirer avantage. Leurs qualités, leurs aptitudes ne sont pas forcément les mêmes, et cela peut leur permettre de s’aider à l’entraînement. La collaboration doit permettre de combler les lacunes. Avec Ronald, nous sommes tous deux martiniquais. S’il y a un problème, on jouera cartes sur tables pour parler de ce qui ne va pas. On a à y gagner, lui et moi, et à mettre cette situation à profit.

Vous vous entraînerez ensemble, en même temps ?

A mon sens, il est ridicule que deux athlètes s’entraînent séparément simplement parce qu’ils sont rivaux en compétition. Le mieux est de se préparer ensemble. Si l’un est moins bon que l’autre, et bien, il faut l’accepter. Sinon, le jour où ils se retrouvent ensemble aux championnats de France, comment ils font ? On organise une deuxième course sur le stade annexe ?

Revenons un peu en arrière. Pendant deux ans, en 2004 et 2005, vous avez évolué très loin du niveau de votre record (10"22), entre 10"55 et 10"60. Pour quelles raisons ?

J’ai connu une baisse de motivation, dues aux blessures en particulier. Depuis 2002, je n’ai pas vraiment disputé de championnat de France élite, puisque je me blesse sur 100 m en 2003. 2003, c’était pourtant l’année où j’avais commencé à me sentir bien en jambes. Mais je me blesse à nouveau... Il n’y a pas de secret, en sprint : si la motivation n’est pas là, il n’y a plus de sprinter. L’absence de motivation est notre poison. On court toujours sur une lame de rasoir. Et puis, j’ai aussi connu des problèmes personnels. Je subissais une espèce de tension, de pression que je supportais d’habitude, mais là... Disons que j’avais envie d’autre chose dans ma vie. De sortir, de faire la fête, peut-être un petit peu trop. Mais maintenant que j’ai vécu cela, je sais que je pourrai le refaire après, plus tard, après ma carrière. Mais construire une performance, travailler pendant des années à cela, c’est maintenant. Ma motivation a aussi dégringolé parce que je n’étais pas sérieux. Maintenant, je veux être « carré ».

Avec quels objectifs ?

Ah, ça, j’ai appris à les garder pour moi. Tout ce que je peux dire, c’est que... vous verrez bien ! Pour l’instant, j’ai de bonnes sensations. Je ne dis pas que mes résultats seront exceptionnels, mais j’espère qu’ils seront bons. J’ai des objectifs très clairs, mais je préfère ne pas en parler. Dans le passé, j’ai trop parlé, et pas assez assumé derrière.

* Fabrice Calligny évoque les championnats du monde juniors de Santiago du Chili, en 2000, où l’équipe de France, dont il était l’un des leaders, avait remporté six médailles, un record. Parmi celles-ci, l’argent (et le record de France) du 4x100 m, emmené par Calligny, alors champion d’Europe du 100 m, avec également Ladji Doucouré, Leslie Djhone et Ronald Pognon.

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