Golden League : Jones et Wariner en forme
Publié le dimanche 9 juillet 2006 à 13h16min
Des têtes d’affiche au rendez-vous et un zest de surprises, la recette est éprouvée mais n’en demeure pas moins savoureuse. Les 75500 hôtes du stade de France ce samedi ont pu s’en délecter avec bonheur, gratifiés de quelques belles performances. Et il fallait bien ça pour que le public puisse vibrer à sa convenance puisque les français (en pleine préparation des championnats d’Europe il est vrai) n’ont guère brillé sur la piste dionysienne, exception faite de Ronald Pognon, troisième d’un 100 m qui ne manquait pourtant pas d’arguments.
Après simplement deux étapes de la très lucrative Golden League, ils ne sont déjà plus que quatre à pouvoir prétendre décrocher le magot à l’issue des débats. La parité est scrupuleusement respectée : deux femmes, deux hommes sont toujours en course dans cette véritable ruée vers l’or. Quatre athlètes intouchables en ce début de saison estivale, souverains dans leur discipline respective avec une aisance déconcertante.
Asafa Powell, co-détenteur du record du monde de la ligne droite avec son grand ami Justin Gatlin, est de ceux-ci. Et l’insaisissable jamaïcain aura fort à faire pour pérenniser son hégémonie. Non pas qu’il soit apparu menacé durant sa foulée francilienne, mais la discipline reine étant par essence imprévisible et sensible à la moindre interférence, franchir en tête chacune des lignes d’arrivée des six épreuves jalonnant la ligue dorée relève à l’heure actuelle de l’exploit.
De fait, ces demoiselles Sanya Richards et Tirunesh Dibaba semblent davantage en mesure de faire tomber la cagnotte annuelle. Invaincue cette année, la première a bien l’intention de dominer le 400 m sans partage le plus longtemps possible et l’a de nouveau fait savoir en prenant pour témoin le stade de France. Le message, chronométré à 49"73, est d’une clarté absolue, tout comme l’est celui de l’éthiopienne deuxièmement nommée. Championne du monde en titre, la jeune Tirunesh Dibaba n’a pas fait défaut à sa réputation en s’adjugeant en toute décontraction un 5000 m que ses consœurs ont pour la plupart bouclé dans la douleur (14’54"24).
Wariner va bon train
Et que dire de Jeremy Wariner ! Dernier chercheur d’or au terme du rendez-vous hexagonal, la nouvelle "loco de Waco" est bel et bien le digne héritier de Michael Johnson. Bluffant de facilité, coupant son effort à quelques dix mètres du but, le jeune prodige texan, 20 ans tout juste, a donné la leçon à ses aînés en descendant sous la barre des 44 secondes avec une marge ahurissante. La meilleure performance mondiale de l’année à la clef (43"91), Jeremy Wariner a une fois de plus éclaboussé la réunion de son talent, faisant preuve d’un potentiel tout bonnement monstrueux pour son âge.
Moins jeune, mais toute aussi explosive, Marion Jones, 30 ans, n’a manifestement rien perdu de son talent. Les tourments de l’affaire Balco ne l’ont pas tuée, l’adage voudrait qu’ils l’aient rendue plus forte. Pas impossible au vu de sa démonstration du jour. Tout juste sacrée championne nationale sous la bannière étoilée, MJ s’est rappelée au bon souvenir de ses plus glorieuses sorties en réglant le 100 m en 10"92. Là encore, le message à l’égard de la concurrence a le mérite d’être explicite. Les Torri Edwards, Lauryn Williams ou Me’Lisa Barber, autant de jeunes louves aux longs crocs, n’ont qu’à bien se tenir : la reine est de retour.
Et s’il fallait un roi au bras de cette dernière, Kenenisa Bekele n’aurait rien d’un usurpateur. Surpris à Oslo lors de la première échéance de la Golden League, l’éthiopien a profité de son escale à Saint-Denis pour remettre les pendules à l’heure après 5 kms de course, signant au passage le nouveau temps référence de la saison (12’51"33). Ainsi effacée, sa contre-performance norvégienne pourrait en outre avoir un impact limité sur son compte en banque, le mode de répartition des liquidités à l’issue des six étapes en or autorisant désormais un faux pas. Un peu d’humanité dans cet univers impitoyable.
Les Bleus sur la réserve
Loin de telles considérations strictement vénales, les tricolores se sont pour leur part évertués à parfaire leur préparation en vue des championnats d’Europe qui se tiendront à Göteborg, le mois prochain. Une réalité quelque peu frustrante pour un public qui souhaitait avoir un avant-goût de victoire dans ce vaisseau dionysien, érigé au rang de sanctuaire depuis bientôt huit ans. La magie bleue a néanmoins poussé les athlètes français à aller au bout d’eux même. Et à ce petit jeu, Ronald Pognon sur 100 m et Vanessa Boslak à la perche ont trouvé leurs limites personnelles actuelles à un seuil très satisfaisant.
L’homme le plus rapide de France (9"99), loin d’être ridicule aux côtés de la fusée Powell, a pointé ses pointes au troisième rang à la faveur d’un chrono de 10"11, devant des pointures de la spécialité telles que Shawn Crawford et Leonard Scott tandis que la nordiste, pourtant contrainte de jeter l’éponge en raison d’une blessure à la cheville, trouvait les ressources nécessaires pour franchir 4m61 et se classer deuxième, à 15 cms de l’inaccessible Yelena Isinbayeva, incarnation au féminin du Tsar Sergey Bubka.
La performance de Latifa Essarokh, troisième d’un 1500 m féminin dominé par le tandem russe coutumier Yuliya Chizhenko-Yelena Soboleva, autorise par ailleurs les espoirs les plus fous pour l’avenir. En revanche, Ladji Doucouré, bien qu’auteur d’un temps honorable sur 110 m haies (13"21), doit se contenter d’une cinquième place décevante eu égard à son statut de champion du monde. De même, Mehdi Baala, victime de sa générosité sur 1500 m et seulement sixième à l’arrivée en 3’32"06, ainsi que le fameux duo du 400 m tricolore, Marc Raquil et Leslie Djhone, respectivement sixième et septième du jour, n’ont pu répondre aux attentes placées en eux. Qu’importe ! La partie n’en est que remise. Rendez-vous est d’ores et déjà pris en Suède, dans un mois.
