Antarctic Ice Marathon : Catherine Drysdale, première femme à triompher sur la glace de l’Antarctique

Un marathon aux confins du monde
Depuis vingt ans, l’Antarctic Ice Marathon fascine les coureurs les plus aguerris, attirés par la promesse d’une aventure sportive aux confins du monde autant que par le prestige d’une épreuve disputée sur le continent le plus hostile de la planète. En 2025, cette course emblématique a changé de dimension lorsque Catherine Drysdale, une coureuse australienne de 35 ans, a inscrit son nom au palmarès en devenant la première femme à s’adjuger la victoire au classement général, devant tous ses adversaires masculins et féminins. Ce succès, acquis au terme de 42,2 kilomètres de neige tassée, de vent glacial et de froid pénétrant, résonne bien au-delà du cercle des ultras et confirme la place des femmes au sommet de la course d’endurance.

Le profil discret d’une championne
Catherine Drysdale n’est pas une professionnelle à plein temps mais une gestionnaire de portefeuille originaire de Sydney, qui concilie carrière exigeante et entraînements pour les courses de fond et les défis extrêmes. À 35 ans, elle avait déjà à son actif plusieurs expériences en marathon et en endurance, mais rien ne pouvait totalement la préparer à l’environnement radical de l’Antarctique, où le moindre détail, alimentation, gestion du froid, choix des vêtements techniques, peut faire la différence entre une performance historique et un abandon. Sa capacité à transposer la rigueur de son métier à la préparation de ce projet a joué un rôle clé dans sa réussite, en l’aidant à planifier chaque aspect de sa course comme un investissement à long terme.

Union Glacier, théâtre d’un exploit
Le décor de son exploit se situe à Union Glacier, un camp logistique isolé à environ 600 miles, soit près de 1 000 kilomètres, du pôle Sud, sur le continent antarctique. C’est là que les organisateurs de l’Antarctic Ice Marathon tracent un circuit de 42,2 kilomètres sur une surface de neige et de glace compactées, exposée aux vents et aux variations brusques de température, loin de tout repère urbain ou foule de spectateurs. En 2025, une soixantaine d’athlètes environ, venus de 20 pays, ont répondu à l’appel pour prendre le départ de cette 20e édition, tous conscients que le terrain, plus que les adversaires, serait le juge de paix de la journée.

Des conditions météorologiques impitoyables
Les conditions météo au moment de la course ont été à l’image de la réputation de l’épreuve, avec un thermomètre oscillant autour de –15 °C et un vent soutenu qui renforçait encore la sensation de froid sur les zones les plus exposées du parcours. Sous les pieds, la neige tassée et les plaques de glace rendaient la foulée incertaine, imposant une vigilance de chaque instant pour éviter les glissades et les faux pas, tout en maintenant une allure suffisamment régulière pour rester dans le coup au classement. Dans cet environnement rude, les participants n’ont à disposition que quelques points de ravitaillement et de contrôle, et la gestion de l’équipement anti-froid, des lunettes de protection et des couches thermiques devient aussi stratégique que la gestion de l’effort.

Une course maîtrisée de bout en bout
Catherine Drysdale a pris la tête de la course tôt dans l’épreuve et ne l’a plus quittée, adoptant une stratégie d’allure régulière sans s’arrêter pour de longues pauses, malgré les conditions cinglantes. Elle a franchi la ligne d’arrivée en 3 h 48 min 43 s, un temps qui, en milieu urbain, n’aurait rien d’un record absolu mais qui, dans ce contexte extrême, traduit une maîtrise remarquable des éléments, de son corps et de son mental. Surtout, ce chrono lui a permis de devancer tous les concurrents, hommes et femmes confondus, et de s’adjuger la première place au classement général, une première dans les vingt ans d’histoire de cette course.

Un podium révélateur de l’endurance féminine
Derrière la lauréate australienne, le Russe Denis Nazarov a pris la deuxième place en 3 h 54 min 49 s, suivi du Belge Rune Buyl, troisième en 4 h 02 min, confirmant le niveau relevé du plateau masculin et l’intensité de la course jusqu’au bout. La Polonaise Joanna Drewnicka-Ogrodnik s’est classée quatrième au scratch et deuxième femme en 4 h 13 min, tandis que d’autres prétendants comme le Britannique Matthew Brown et le Chilien Felipe Soto ont complété le top 10 dans des chronos compris entre un peu plus de 4 h 20 et 5 h, illustrant à quel point la gestion de l’effort prime sur la vitesse pure dans ces conditions. Le fait que deux femmes figurent parmi les quatre premiers du classement général, et que l’écart entre les meilleurs hommes et les meilleures femmes se compte en quelques minutes seulement, envoie un signal fort sur la capacité des athlètes féminines à rivaliser au plus haut niveau dès que l’endurance, la résilience mentale et l’intelligence de course deviennent les facteurs déterminants.​

Une épreuve rare et mythique
L’Antarctic Ice Marathon s’est imposé au fil des années comme l’un des marathons les plus extrêmes au monde, d’abord par son environnement, ensuite par la logistique nécessaire pour y participer. L’épreuve se déroule sur un site isolé, accessible par un nombre limité de vols spécialisés, et le coût d’inscription, très élevé, de l’ordre de plusieurs dizaines de milliers d’euros, filtre naturellement les candidats, réservant la ligne de départ à des coureurs disposant d’un solide projet sportif et financier. Cette rareté contribue à la mythologie de la course, en faisant de chaque édition un rendez-vous à part dans le calendrier des marathons, loin des majors urbaines mais tout aussi exigeant, sinon davantage.

Une barrière symbolique brisée
Dans ce contexte, la performance de Catherine Drysdale dépasse la simple statistique d’une première féminine au palmarès et s’inscrit comme une étape majeure dans l’histoire de l’épreuve. Pendant deux décennies, aucune femme n’avait réussi à s’imposer au classement général, même si plusieurs avaient déjà marqué la course par des performances de haut niveau dans leur catégorie. En remportant la victoire au scratch, l’Australienne a brisé une barrière symbolique et démontré que, sur ce type de terrain extrême, les écarts de performance entre hommes et femmes peuvent s’estomper lorsque l’endurance et la résistance psychologique deviennent les facteurs décisifs.

Un récit de résilience et de sens
Après sa victoire, Catherine Drysdale a décrit l’épreuve comme « contraire à tout ce qu’elle avait fait auparavant », insistant sur le fait que chaque moment de souffrance était compensé par la conscience de courir en Antarctique, sur un sol que peu de marathoniens fouleront un jour. Ce sentiment d’exception nourrit le récit autour de sa course, transformant son chrono en une histoire de résilience, de préparation minutieuse et de capacité à trouver un sens dans la difficulté. Pour de nombreux passionnés de course à pied, son témoignage donne un visage humain à une aventure qui, vue de loin, peut sembler presque irréelle.

Un jalon pour le sport féminin d’endurance
Cette victoire intervient par ailleurs dans un contexte où les performances féminines en ultra-endurance attirent de plus en plus l’attention, qu’il s’agisse de records sur trail, sur ultra-marathon ou sur des défis multi-jours. En s’imposant sur l’Antarctic Ice Marathon, Drysdale rejoint la liste grandissante des athlètes qui redéfinissent la notion de limite dans le sport féminin, montrant qu’il est possible de dominer des formats longs et hostiles sans disposer des mêmes armes que les sprinters ou les spécialistes de la vitesse pure. Son succès risque d’inspirer d’autres coureuses à viser des épreuves atypiques, à la recherche non seulement d’un temps mais aussi d’une expérience et d’un récit à partager.

Une page d’histoire pour l’Antarctique et le marathon
L’exploit de Catherine Drysdale à l’Antarctic Ice Marathon restera comme une date clé dans l’histoire de cette épreuve et, plus largement, dans celle du marathon extrême. En devenant la première femme à remporter la course au classement général, elle a fait d’Union Glacier le théâtre d’une avancée symbolique pour le sport féminin, prouvant qu’à force de préparation, de courage et de persévérance, il est possible de s’imposer jusque sur les terres les plus inhospitalières du globe. Pour la communauté des marathoniens comme pour les lecteurs et lectrices passionnés de grands défis, son histoire illustre à quel point la quête de dépassement de soi trouve un terrain d’expression unique dans ces courses qui, au-delà du chronomètre, invitent à repousser l’horizon du possible.