Course de Noel : Jamal deux sans trois

Maryam Jamal se faufile dans le couloir d’arrivée. Sourire branché, pulsations déjà au repos, elle rejoint Tareq Sabt Yaqoob, son mari d’entraîneur. L’athlète du Bahreïn n’entraîne pas une cohue monstre derrière ses pas, l’aura d’une championne du monde ne déclenche aucune hystérie malsaine auprès des fans de course à pied. Accessible, calme et ouverte aux félicitations, la star du demi-fond planétaire enchaîne les autographes et répond aux diverses sollicitations d’après victoire. Autour d’elle, une nuée de compatriotes viennent féliciter leur soeur éthiopienne au passeport bahreïni. La gazelle d’Assela, tête d’affiche et diamant brut de cette 39 ème édition de la Course de Noël, vient de signer son troisième succès dans les rues de la capitale valaisanne. Titillée en cinq tours par la petite Ethiopienne Tsigé Worku, elle a dû s’employer au sprint pour régler les affaires courantes. Habituée à prendre les devants sur la piste, Maryam Jamal a cette fois scruté la concurrence avant d’accélérer.

Son triomphe, logique, a été mis en valeur par la très belle course de Worku. Il y a peu de gloire à vaincre sans combattre... Jamal n’a jamais vraiment tremblé samedi en fin d’après-midi, mais elle a quand même dû composer avec la chevauchée de Worku. Gagner à Sion restera toujours quelque chose de spécial pour Maryam Jamal. « Je suis contente d’être ici à Sion. J’ai accepté avec plaisir l’invitation des organisateurs et je suis toujours heureuse de revoir ce peuple valaisan ». Sur l’épaule de la petite championne du monde, Tareq, le mari, joue les traducteurs. Le compagnon évoque déjà les défis à venir : « Maryam est actuellement en période d’endurance. On ne sait pas encore comment on va organiser la suite de son hiver. On va prochainement rendre visite au roi du Bahreïn. Mais l’essentiel pour 2008 sera de préparer les Jeux olympiques de Pékin. Toute la préparation de Maryam sera axée autour de cet objectif ».

Le retour de Christina

Derrière ces fulgurances africaines, les coureuses suisses ont ciselé une course de haute volée. Les deux plus belles surprises du week-end ont été signées par Anita Weyermann (5 ème et première athlète européenne) et Christina Carruzzo (7 ème). La Bernoise, quadruple lauréate à Sion, s’est rappelée aux bons souvenirs des spectateurs valaisans, le jour de ses 30 ans. Anita Weyermann entretient un lien privilégié avec la Course de Noël. « J’aime cette ville, ce public et ce club organisateur (ndlr : le CA Sion) qui sait toujours faire la fête. J’ai toujours dit que de 20 à 30 ans, ça descend... Après, ça monte ! » Quant à la Valaisanne, elle a retrouvé son large sourire après deux années de galère. Christina Carruzzo a confirmé ce qu’elle pressentait déjà depuis quelques semaines : elle est de retour et pour de bon ! « J’ai pu suivre Valérie Lehmann (ndlr : la championne de Suisse du 1500 m qui a fini 6 ème) presque jusqu’au bout. C’est vraiment encourageant pour la saison prochaine. Je ne ressens plus aucune douleur à mes tendons. Cette année, j’ai pris toutes mes courses comme du bonus. Je voulais déjà pouvoir recourir et là, ça tient ! J’ai donné le départ de la Course de Noël deux ans de suite. Etre au milieu du peloton, c’est quand même ce que je préfère... »

L’année Chengere

Chez les hommes, l’Ethiopien Tolossa Chengere (24 ans) a signé un nouveau succès après ses victoires acquises à Carouge, Morat-Fribourg, Martigny, Bâle et Genève. Il a devancé au sprint le Kényan Nicholas Koech. Le requérant d’asile d’Epalinges, qui vaut 13’55" sur 5000 m, a franchi un nouveau palier cette année. La saison prochaine, ce grand écumeur des courses hors stade, aimerait se lancer plus régulièrement sur 1500 m. Il ne pourra malheureusement pas zapper nos latitudes, son statut de réfugié l’empêchant de quitter la Suisse. Une trajectoire qui rappelle étrangement celle de Maryam Jamal, ex-Zenebech Tola.

Côté valaisan, Alexis Gex-Fabry (11 ème), Tarcis Ançay (12 ème) et David Valtério (17 ème) ont joué les animateurs locaux avec de belles chevauchées sur un parcours devenu encore plus roulant avec les détours sur la Planta et l’enfilade dans la minuscule rue de Conthey. Dans l’aire d’arrivée, David Valtério, qui a dû lâcher du lest sur ses deux aînés, louait ce changement de parcours. « C’est beaucoup mieux qu’avant et je ne suis pas le seul à le dire. Il y a plus de spectacle et j’ai été étonné du monde présent sur les trottoirs. On est encouragé partout ». L’épreuve sédunoise semble avoir trouvé le parcours idéal avec ce défilé ramassé sur lui-même qui a séduit coureurs, organisateurs et spectateurs. De quoi fêter dignement le quarantième anniversaire de l’épreuve l’année prochaine.