Le jeffing : Courir en marchant, marcher pour mieux courir
Publié le jeudi 7 août 2025 à 10h33min
Technique d’entraînement venue des États-Unis, le jeffing, ou « run-walk-run », séduit de plus en plus de coureurs amateurs comme aguerris. Longtemps méconnu ou sous-estimé, il offre pourtant des bienfaits physiologiques, psychologiques et stratégiques indéniables. Zoom sur une méthode qui remet la marche au cœur de la performance.
Un paradoxe séduisant
Marcher pour mieux courir. Voilà une idée qui aurait fait bondir plus d’un athlète il y a quelques décennies. Et pourtant, le jeffing, combinaison structurée de course et de marche, prouve jour après jour son efficacité. Loin d’être une méthode de repli ou une « faiblesse », c’est une stratégie volontaire qui repose sur la régularité, l’économie d’énergie et l’endurance. Déjà adoptée par des milliers de coureurs aux États-Unis, au Royaume-Uni, et de plus en plus en France, elle ouvre la voie à une pratique plus inclusive, mais pas moins ambitieuse. Le jeffing, c’est réconcilier effort et plaisir, performance et écoute de soi.
C’est quoi le jeffing ? Une alternance bien rythmée
Le jeffing tire son nom de Jeff Galloway, ancien marathonien olympique américain et coach reconnu. À la fin des années 1970, il conçoit une méthode d’entraînement pour permettre aux débutants de courir sans se blesser ni se décourager. Le principe est simple : alterner des phases de course avec des phases de marche, selon des intervalles définis à l’avance. Par exemple, 2 minutes de course pour 30 secondes de marche, ou 4 minutes de course pour 1 minute de marche.
Mais attention, ce n’est pas une pause. Chaque période de marche est intégrée stratégiquement pour retarder la fatigue, maintenir un rythme constant et permettre au corps de récupérer sans perdre la dynamique de l’effort. Le jeffing repose donc autant sur la régularité que sur la gestion de l’intensité.
Jeff Galloway, un pionnier visionnaire
Jeff Galloway n’a pas inventé la marche, mais il l’a réhabilitée dans un monde où l’on croyait qu’il fallait toujours courir plus, plus vite, plus fort. En 1974, alors qu’il entraîne un groupe de débutants, il remarque que l’alternance course-marche permet à tous de progresser sans blessure. Il structure alors cette méthode, la teste lui-même, et publie en 1984 son premier livre sur le sujet : Galloway’s Book on Running.
Très vite, des coureurs de tous niveaux s’y intéressent. Certains réalisent même des marathons avec cette approche et améliorent leurs chronos, notamment en réduisant les phases d’épuisement. Aujourd’hui encore, Jeff Galloway promeut activement cette méthode, adaptée aux débutants, mais aussi aux coureurs confirmés cherchant à durer plus longtemps ou à rebondir après une blessure.
Les bienfaits du jeffing : Une approche douce mais efficace
Le jeffing n’est pas seulement une alternative pour débutants : il est une stratégie d’entraînement à part entière. Ses avantages sont multiples : réduction des blessures, meilleure récupération, maintien de la motivation, gestion optimale de l’effort… En insérant régulièrement de la marche, on évite les pics de fréquence cardiaque, on épargne les articulations, et on accroît la capacité à courir plus longtemps.
Sur le plan psychologique, c’est aussi un excellent moyen de briser la monotonie et de rester concentré sur ses objectifs. Et surtout, le jeffing donne le sentiment de reprendre le contrôle de sa course, en transformant une possible faiblesse (ralentir ou marcher) en une force maîtrisée.
Des études ont montré que les coureurs utilisant cette méthode finissent souvent leur course avec un meilleur temps que s’ils avaient tenté de courir en continu, car ils évitent les murs de fatigue en fin d’épreuve. Cela peut sembler paradoxal, mais dans une discipline d’endurance, la gestion du corps est plus précieuse que la vitesse brute.
Comment bien pratiquer le jeffing pour mieux courir ? Trouver son rythme
Le jeffing demande un peu de rigueur et de préparation. D’abord, il faut déterminer l’objectif de la course (distance, allure souhaitée, terrain) puis adapter le ratio course/marche. Un coureur rapide choisira peut-être un cycle de 8 minutes de course / 30 secondes de marche. Un coureur plus débutant pourra commencer par 1 minute de course / 1 minute de marche.
Le plus important est d’intégrer les phases de marche dès le début de la course, et non d’attendre d’être fatigué. C’est cette régularité qui permet au corps de rester en mouvement sans s’épuiser. Aujourd’hui, plusieurs montres GPS ou applications permettent de programmer ces intervalles. Il suffit de les suivre avec discipline, et d’ajuster en fonction des sensations.
En compétition, le jeffing peut aussi s’appliquer. De nombreux marathoniens l’utilisent avec succès, parfois en suivant les groupes de pace avec des stratégies intégrant la marche. À condition d’être accepté socialement (il reste encore des idées reçues), le jeffing permet d’envisager la course sous un nouveau jour.
Le jeffing, solution idéale pour les coureurs ? Plus qu’une méthode, une philosophie
Le jeffing est bien plus qu’une simple alternance entre course et marche. C’est une philosophie de l’endurance, centrée sur l’intelligence du corps, la patience et la durabilité. Il convient particulièrement aux coureurs qui veulent se faire plaisir sur la durée, préserver leur capital santé, et éviter les cycles blessures/repos trop fréquents.
Il s’adresse aussi à ceux qui souhaitent reprendre après une coupure, un surmenage ou un traumatisme. En rendant l’effort plus accessible, il devient un outil d’inclusion dans les courses populaires, où chacun peut s’aligner à son niveau, sans pression de performance.
Certains puristes de la course continueront de voir la marche comme une rupture. Mais de plus en plus de sportifs, y compris performants, intègrent cette alternance comme une technique de progression, pas une régression. Le jeffing ne remplace pas la course, il la rend simplement plus humaine, plus intuitive, et souvent… plus efficace.
Marcher pour durer, courir pour avancer
Loin d’être un aveu de faiblesse, le jeffing redonne à la course à pied une dimension durable et maîtrisée. Il permet de repousser ses limites en douceur, sans les briser. Grâce à l’intuition de Jeff Galloway, des milliers de coureurs ont découvert qu’on pouvait aller plus loin, plus longtemps, sans forcément aller plus vite.
Dans une époque où la performance est souvent glorifiée au détriment de la santé, le jeffing rappelle que la sagesse et la constance sont aussi des formes d’excellence. Et si la meilleure façon de progresser était tout simplement de s’écouter, et parfois, de s’arrêter… pour mieux repartir ?
Voir en ligne : Marathons
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