Michael Johnson : « Aucun regret »
Publié le mardi 6 mai 2008 à 08h42min
En visite à Paris pour lancer les festivités du dixième anniversaire du meeting Gaz de France Paris Saint-Denis, Michael Johnson a pris le temps de revenir sur son exceptionnelle carrière. Entretien exclusif.
Michael Johnson, lorsque l’on vous interroge sur votre riche carrière, vous répondez que votre plus belle performance est d’avoir su rester numéro un durant dix ans. Est-ce que cela compte plus que votre palmarès olympique et mondial ?
Un bon athlète n’est pas celui qui parvient à décrocher une médaille olympique. Je ne veux pas dire par là que tout le monde peut le faire mais que beaucoup le font. Peu, par contre, parviennent à se maintenir au top durant une longue période. Il est toujours difficile de prendre un épisode particulier et de dire que c’est là l’évènement le plus marquant de ma carrière. Si vous mettez en exergue l’une des choses que j’ai réussie à accomplir durant ma carrière, cette dernière ne ressemble plus à ce qu’elle est. Je ne suis pas venu en compétition et gagner une ou deux fois. Chaque fois que je me suis présenté à un championnat, j’ai gagné. C’est ça qui, pour moi, est le plus marquant car personne n’avait fait cela avant.
Peut-on dire que vous êtes parvenu à remplir tous vos objectifs ?
Oui, j’ai atteint chacun de mes buts. J’ai été très chanceux d’avoir réussi cela et d’être parvenu à rester en bonne santé durant la grande majorité de ma carrière. Le plus grand ennemi pour un sprinteur, c’est la blessure. Moi, je suis parvenu à rester relativement en bonne forme. Je me suis entraîné dur et je suis très chanceux d’être parvenu à réaliser tous les buts que je me m’étais fixé.
Aucun regret à mettre à votre crédit ?
Aucun. J’ai réussi à tout faire. Il y a des athlètes qui sont blessés et qui, de fait, ne peuvent pas faire tout ce qu’ils voulaient avant que leur carrière ne s’arrête. Alors ils s’interrogent, ils se demandent ce qu’ils auraient pu faire si… Moi, je n’ai pas à me demander. Je sais.
Vos records du monde sur 200 et 400 mètres restent, à ce jour, les marques à battre. Comment expliquez-vous la longévité de ces records ?
Le 200 et le 400 mètres sont des courses très difficiles. Lorsque j’ai battu le record du monde du 400 mètres, c’était la marque à battre la plus ancienne qui existait. C’était pareil pour le 200 mètres. Lorsque je l’ai battu en 1996, il existait depuis 1975.
Vous avez pratiqué de nombreux sports avant de vous focaliser sur l’athlétisme. Qu’est-ce que cela vous a apporté et pourquoi avoir finalement choisi la piste ?
J’ai pratiqué tous les sports quand j’étais très jeune et à mon entrée en High School, je me suis focalisé sur l’athlétisme. Il était important pour moi de toucher à tout afin de savoir ce qui me convenait le mieux. Et ça a été l’athlétisme.
Vous avez également tâté un peu de 100 mètres. Pourquoi vous être consacré au 200 et au 400 mètres exclusivement ? Est-ce une simple question de performances ?
La performance est une chose mais quand vous commencez l’athlétisme très jeune, vous finissez par trouver progressivement l’épreuve dans laquelle vous êtes le plus talentueux. Ça a été le 200 et le 400 pour moi et non le 100 mètres. En fait, on ne choisit pas la discipline dans laquelle on rêve d’être numéro un mondial, c’est plus la discipline qui nous choisit. Il y a différents critères à remplir pour chaque épreuve et si vous répondez à tous, vous aurez la possibilité de devenir l’un des meilleurs dans la spécialité.
Quelles étaient, pour vous, ces principaux critères ?
Ce qui m’a permis d’avoir du succès est un mélange de vitesse et de force. Les sprinteurs ont souvent plus l’un que l’autre et un mélange égal des deux reste quelque chose de très rare. C’est pour cela que j’ai été capable de faire ce que personne n’avait réalisé. La plupart des athlètes n’a pas cette sorte de mélange unique.
Aviez-vous un modèle, une source d’inspiration ?
Pas en athlétisme. J’aime le sport parce que j’aime la compétition et que j’aime courir. J’ai toujours voulu être le meilleur possible et ne ressembler à personne. Pour le reste, mon père a toujours été mon modèle et l’est encore. J’ai appris de lui et j’apprends toujours. Il m’a aidé, dès le plus jeune âge, à prendre les bonnes décisions.
A quelques semaines du coup d’envoi des Jeux Olympiques de Pékin, l’éventualité d’un boycott est toujours d’actualité. Que pensez-vous du fait de ne pas prendre part au rendez-vous chinois ?
Je me souviens des boycotts de 1980 et de 1984. J’étais très jeune. Lorsque les pays ont décidé de boycotter, beaucoup d’athlètes étaient très déçus. Ceux qui participaient l’étaient aussi car ils savaient qu’ils ne prenaient pas part, à ce moment-là, à une compétition majeure. Ce n’était pas une bonne idée et je pense qu’avec le recul, on s’en rend compte. Ce n’est donc pas plus une bonne idée maintenant. Mais je pense que pour Pékin, on parle en effet beaucoup de boycott mais que tout cela restera au stade de la parole.
Que représente pour un athlète le fait de participer aux Jeux Olympiques ?
Pour un athlète, c’est le pinacle. C’est la compétition à laquelle on souhaite le plus participer et celle à laquelle il est le plus dur de prendre part. C’est la plus spéciale.
Quel est le meilleur souvenir que vous gardez de vos participations aux Jeux ?
Tous les Jeux Olympiques auxquels j’ai participé ont été des moments particuliers pour moi. Chaque fois que j’ai participé à des Jeux Olympiques, j’ai eu l’occasion de réaliser quelque chose de spécial. Cela a été une belle opportunité chaque fois et notamment celle de représenter mon pays, ce qui signifiait beaucoup pour moi.
Vous avez travaillé toute votre carrière avec Clyde Hart. On a l’impression maintenant qu’il est rare de trouver couple aussi solide et que les athlètes ont tendance a changer fréquemment d’entraîneur…
Je pense que ce n’est pas vrai. Il est facile de penser cela mais ce n’est pas la vérité. Il y a en effet des athlètes qui changent souvent de coach mais il y en a encore qui restent avec le même durant toute leur carrière. C’est un choix personnel. Les athlètes réagissent en fonction de ce qui est le mieux pour eux. Il est difficile de savoir, lorsqu’un athlète change de coach, qu’elle était la situation entre eux. Il est donc difficile de dire si c’est un bon choix ou non. Moi, j’ai eu de la chance. L’entraîneur avec qui j’étais au tout début s’est avéré être le bon pour moi. Mais ça va très vite dans les deux sens. Si Clyde Hart n’avait pas été le bon, j’aurais été contraint, moi aussi, de changer. Et si mon deuxième choix ne s’était pas avéré payant, j’aurais dû changer encore.
Que pensez-vous du choix de Jeremy Wariner de ne plus travailler avec Clyde Hart ?
Je pense que Jeremy a de la chance. Le changement d’entraîneur qu’il a dû faire n’en est pas vraiment un. Son nouvel entraîneur était l’un de mes compagnons d’entraînement, nous avons donc eu les mêmes programmes. Jeremy et Michael Ford ont travaillé ensemble les six dernières années, en compagnie de Clyde Hart. Ce n’est pas un vrai changement. Il n’a pas à s’adapter à un programme totalement nouveau. Il a de la chance de pouvoir rester au même endroit et de continuer à faire peu ou prou la même chose.
Que pensez-vous de ses chances de décrocher un deuxième or olympique ?
Je pense qu’il a de grandes chances de remporter l’or. Il domine le 400 mètres depuis quatre ans. Il a perdu une course depuis qu’il a gagné les Jeux Olympiques. Il est probablement l’un des athlètes à avoir les plus grandes chances de s’adjuger l’or. Mais nous sommes dans une année olympique, il doit rester en forme. Si c’est le cas, je pense qu’il sera très très dur à battre.
Pensez-vous qu’il ait des chances de battre votre record sur tour de piste ?
Je pense que Jeremy peut battre le record du monde mais on ne sait pas quand cela va arriver. Peut-être cet été. Peut-être dans deux ans, dans cinq ans. Je serais très heureux qu’il le batte. C’est dans la logique des choses. Depuis sa médaille d’or olympique, il a montré qu’il en était capable. Nous travaillons pour.
* Propos recueillis par Sophie Danger
Voir en ligne : Sport 365
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